• A la croisée des Neurosciences et de la Psychanalyse

    Source : Implications philosophiques.org

    "Le problème du libre-arbitre se trouve aujourd’hui réactualisé par les découvertes faites dans le domaine des « neurosciences ». Ce terme fut inventé au début des années soixante-dix pour permettre un échange multidisciplinaire entre divers champs du savoir s’attachant à l’étude du cerveau: physiologie, génétique, pharmacologie, chimie, biophysique, psychologie. Des expériences telles que celles de Benjamin Libet ont ainsi prétendu donner une réponse à la question que les philosophes se posent depuis l’Antiquité: sommes-nous libres ou bien déterminés? Libet et ses collaborateurs ont mis en place un protocole expérimental permettant d’étudier, grâce à des électrodes implantées dans le cerveau des sujets, les corrélats neuronaux d’un acte volontaire simple, tel que la flexion d’un doigt. Ils ont ainsi comparé l’instant où le sujet rapporte verbalement son intention d’agir, avec l’instant où un événement cérébral se produit pour préparer au mouvement. Or, ces expériences ont montré que le processus cérébral (appelé « readiness-potential ») se produit quelques centaines de millisecondes avant la prise de conscience du sujet. D’où la conclusion, formulée par Libet et ses collaborateurs, que le libre-arbitre, en tant que capacité d’initier une nouvelle chaîne causale, n’existe pas. La cause de l’acte serait en réalité le processus cérébral en lui-même, et non la prise de conscience, qui apparaît plus tardivement. Néanmoins, Libet fait l’hypothèse d’un « droit de veto » qui permettrait au sujet d’empêcher la production de l’acte. Dans l’intervalle de temps qui sépare la prise de conscience de l’intention d’agir, de l’acte lui-même, le sujet pourrait ainsi à tout moment décider de « ne pas » agir. Ce droit de veto serait-il tout ce que nous pouvons sauvegarder de notre « libre-arbitre », au vu des expériences neuroscientifiques ?

    Ces expériences ont été vivement débattues et sont loin de prêter à consensus. Elles laissent entrevoir toutefois le fond du problème, à savoir les rapports qu’entretiennent le cerveau et l’esprit, si tant est que nous puissions admettre l’existence de ces deux entités distinctes. Le matérialisme scientifique ambiant semble plutôt nous inciter à réduire entièrement l’esprit aux mécanismes cérébraux qui le sous-tendent, en faisant de la conscience réflexive un simple épiphénomène de la réalité matérielle qui compose notre cerveau. Or, même si l’on admet ce présupposé matérialiste, ne peut-on néanmoins invoquer le rôle causal que pourrait avoir cette conscience « émergeant » de la matière sur des mécanismes neuronaux plus fondamentaux? La complexité de l’objet-cerveau permet en effet d’entrevoir la possibilité de se situer à différents niveaux d’étude, et de laisser ainsi la place à des phénomènes émergents qui pourraient jouer par eux-mêmes un rôle causal, c’est-à-dire rétroagir sur les niveaux inférieurs. Loin d’ « éliminer » le statut propre de la conscience, elle pourrait dès lors subsister sous la forme d’un niveau de complexité supérieur, tout aussi digne d’étude que les mécanismes neuronaux qui sont à la base du fonctionnement cérébral.

    Pour éclairer cette question du réductionnisme de l’esprit au cerveau, ou « réductionnisme psychophysiologique », qui semble être au cœur du problème du libre-arbitre, il est aujourd’hui particulièrement intéressant de mettre en parallèle les disciplines regroupées sous le nom de neurosciences avec la théorie psychanalytique, dans ses diverses acceptions contemporaines. Cette dernière semble en effet s’opposer aux neurosciences en ce qu’elle traite le fonctionnement psychique dans son versant subjectif, en première personne. L’objet d’étude y est davantage le « mental » que le « cérébral », et l’importance y est accordée aux événements psychiques et aux interprétations que peut en faire le sujet lui-même, avec l’aide de son thérapeute. A première vue, il semblerait donc que la psychanalyse ne soit pas réductionniste, et conserve non seulement toute leur réalité aux événements mentaux, mais leur attribue également un rôle causal, sans lequel toute la théorie psychanalytique s’effondrerait. Néanmoins, il est intéressant de voir que cette position non-réductionniste n’implique pas la reconnaissance du libre-arbitre, bien au contraire. Un déterminisme strict y était pleinement assumé chez Freud, avec l’importance accordée à l’instance psychique qu’il nommait Inconscient, et la théorie de son influence sur nos états mentaux conscients. "


     

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  • Commentaires

    1
    Lorra
    Vendredi 15 Mai 2015 à 16:26

    Merci beaucoup pour ce site et toutes les informations qu’il regorge. Je le trouve très intéressant et je le conseille à tous !
    Bonne continuation à vous. Amicalement.


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